L’Australie a toujours offert au monde du rock au sens large du terme des formations musicales intéressantes, que ce soit au niveau du hard (qui ne connaît pas AC/DC sur cette planète ?), mais aussi au niveau de la pop soyeuse (The Go Betweens et The Church). Après des débuts aux forts relents punks, Midnight Oil s’était imposé au niveau d’un rock brut, revendicatif, écolo avant l’heure, proposant une musique sans concessions.

Avant de devenir mondialement avec les lits qui brûlent (Beds Are Burning pour ceux qui ne suivent pas), ce combo avait proposé des albums d’une richesse incroyable, mené par un Peter Garett au charisme énorme (et à un physique imposant), avec des musiciens hors pair, impliqués à fond dans les causes humanitaires.

10, 9, 8, 7, 6, 5, 4, 3, 2, 1 est pour moi un des sommets du groupe, car il exprime une telle colère justifiée contre les injustices et les défauts de la société au point que cet album fut boycotté dans plusieurs pays, dont les Etats-Unis, directement visés (« US Forces »).

Le titre en décompte a posé beaucoup de questions. Compte à rebours pour une catastrophe ? Compte à rebours pour un succès musical ? Peu importe en définitive.

Le succès de ces 10 titres vient d’une osmose entre textes et musique. En effet, Midnight Oil est un groupe de rock, mais qui ne se limite pas à des sonorités monolithiques, péchant également dans la pop, la new wave, voire dans des sonorités plus atmosphériques. On retrouve une utilisation intelligente d’instruments classiques, mais aussi de synthés et le recours aux chœurs vocaux dénote une créativité croustillante. Chaque membre de ce groupe apporte quelque chose de particulier, Martin Rotsey est impérial à la guitare, Peter Gifford porte à bouts de bras toutes les mélodies avec sa basse profonde et chaloupée, Robert Hirst est d’une inventivité rare à la batterie et Jim Moginie alterne guitare et claviers avec classe.

Je ne jette aucun morceau mais souligne mes titres préférés : « Outside World » ouvre le bal avec des sonorités glaciales et planantes, mettant Peter Garett sur orbite, « Short Memory » est à citer avec ces chœurs tranchants et à l’unisson, « Read About It » est une cavalcade jouissive, « US Forces » regroupe tout ce que Midnight Oil sait faire avec excellence : changement de rythmes, batterie en liberté, soli bien placés), « Power and The Passion » est à citer pour la mélodie imparable… 

Dans un mode « politiquement » correct et soit disant mièvre des années 80, ce groupe faisait bouger les choses et cet engagement était plus que sincère.

Presque 30 ans plus tard, on a pu bien observer que le succès de cet album est venu de la qualité de l’album, et non suite à un tapage médiatique. Le plaisir dure pour mes oreilles depuis 3 décennies, c’est vous dire…